Track-list :Solitary Endless Path
Skies At Our Feet
Where Horizons End
Only The Wind Remembers My NameDrudkh... une formation qui s'est forgée une place de marque dans la scène black metal depuis ses débuts en 2002. Chaque année, les Ukrainiens sortent un album et l'année passée, ils nous en ont servi deux : tout d'abord l'incontournable Blood in Our Wells très vite suivi par Songs of Grief and Solitude qui avait lui, reçu un accueil plutôt mitigé.
Alors qu'en est-il de ce Estrangement ? Attaquons la bête sans plus attendre... La pochette, très colorée (forêts avec un fond orangé) est à l'image des quatre compositions. Il s'agit là d'une véritable osmose avec la nature.
Les riffs sont comme à leurs habitude crades et glacés, parfois dépressifs voir atoniques à l'image du vent qui souffle et dépose lentement ces feuilles mortes sur un sol aride parsemé de terre humectée. Les guitares sont guidées par un duo basse / batterie extrêmement efficace et ce tout le long de l'album. La voix haineuse de Thurios s'avère pour ma part désagréable, presque "irritante" et n'est vraiment pas l'argument fort de cet album : heureusement qu'elle n'est pas très présente et, je tiens à préciser que tout ceci reste purement subjectif.
Chaque compositions comporte un solo de guitare (très peu commun dans le black metal) ce qui est un excellent point car cela crée un contraste avec le son crade de la rythmique et les mélodies majestueuses du solo. Cependant, le choix d'en mettre systématiquement à chaque morceau n'est pas forçément judicieux. Les nombreux break mid tempo sont somptueux et aèrent les compositions qui dépassent toutes les dix minutes, à l'exception de la dernière. La basse, chevaleresque, s'octroie souvent sa propre danse n'hésitant pas à s'élever bien au dessus des guitares tandis que le batterie, très technique, s'adapte aux nombreux changements de rythmes. Certains passages à la limite du planant confèrent une ambiance dantesque grâce à des mélodies tout simplement intenses (Solitary Endless Path) qui font toute la richesse du morceau.
La formation ne s'arrête pas en si bon chemin en proposant des accélérations totalement innatendues et démentielles (frissons au rendez vous) accompagnées d'arpèges pagan mélodiques (Skies At Our Feet). Where Horizons End laisse quant à lui légèrement indifférent car trop classique mais s'intègre néanmoins assez bien au reste de l'album.
Le paroxysme de la magnificence est atteint sur l'instrumentale Only The Wind Remembers My Name qui propose les riffs atoniques les plus accrocheurs de l'album (il faut vraiment l'entendre pour comprendre de quoi il en tient) avec au milieu du titre le meilleur solo de l'album : incroyablement puissant, mélodique et technique avec un côté improvisation très séduisant qui donne l'impression d'être exécuté dans la pièce à côté. Cette outro tout simplement magistrale clôt la vision de sombres forêts automnales que l'on se surprend à avoir tout le long de l'écoute.
Loin d'être transcendant au départ et malgré des parties vocales peu convaincantes, Estrangement dessine ses contours et dévoile sa vraie nature au fil des écoutes. On oublie vite l'aspect superficiellement répétitif qui n'est finalement présent qu'aux premières écoutes.
L'album possède quelques moments exaltants et c'est peut être le plus frustrant : savoir qu'on aurait pu obtenir beaucoup mieux, espérer davantage de ces cours passages d'une rare intensité qui génèrent une ambiance unique. Quand les passages planants ne nous mettent pas pleins d'images en tête, c'est un merveilleux contraste rythmiques crades / mélodies somptueuses qui nous éveille, une basse rampante totalement indépendante du reste ou même une accélération hallucinante et tout simplement impensable qui nous fait frissonner. Ce genre de détails innombrables et complètement à part sont présents en abondance et font de ce Estrangement une pierre angulaire dans la discographie de Drudkh, qui reste tout de même dangereusement ancré dans le même genre.
Entre obscurité et lumière, affliction et espoir, Estrangement offre un voyage spirituel de 36 minutes (un peu court..) qu'on est pas prêt d'oublier même si on sent que Drudkh aurait pu davantage développer et libérer son potentiel créatif, ne serait-ce qu'en jouant davantage sur les ambiances. Car quand on connaît le potentiel de Thurios et sa bande, on est en droit d'attendre encore mieux.
http://www.espritrock.org/pid180/toutes-les-chroniques.html?cid=540
Abyssos