Tracklist :Exile's Journey
A Witness to the Passing of Aeons
Colossal Voids
As Buried Spirits Stir
The Warren
Lashed by Storm
BereftTout semble préconiser que Fen est un groupe nordique ayant sûrement déjà exploré et construit son son à travers des sorties antérieures. Pourtant Fen ne vient ni des contrées nordiques et n'a rien sorti si ce n'est un EP et une démo qui sont tous deux passés plus qu'inapercus. Le quatuor nous vient d'Angleterre et The Malediction Fields représente ce qu'on appelle la grande étape du premier album. Mais alors pourquoi assimiler Fen à un groupe nordique et surtout, pourquoi, inconsciemment, ce groupe aurait pu avoir sorti plusieurs albums ?
Tout devient clair lors de la mise en marche de l'album. Fen officie dans ce qu'on pourrait appeler du black metal atmosphérique, bien que cela soit très réducteur au vu des nombreuses touches post rock qui émanent de sa musique.
Si ce groupe au style très ésotérique peut sembler reprendre différents éléments qui ont fait le succès de certaines formations qu'on ne présente plus (le son des guitares acoustiques de Exile's Journey font penser aux italiens de Forgotten Tomb, la deuxième guitare mélodique sur A Witness to the Passing of Aeons rappelle Alcest ou encore le côté black/doom atmosphérique d'Agalloch dont les anglais sont visiblement friands), il en est tout autre car en associant une tripotée de subtilités à une base très black (entendez par là des riffs puissants et accrocheurs menés par une voix crue), le groupe se démarque par des compositions extrêmement variées d'un titre à l'autre tout en gardant une cohérence très apparente.
Au cas ou vous auriez encore des doutes sur l'éclectisme stylistique du groupe, Colossal Voids remet les pendules à l'heure en proposant un croisement unique entre le black metal et le post rock (voix claire et voix black) avec une outro au piano tout simplement magistral illustrant un talent de composition très développé : on a l'impression que nos pieds quittent le sol pour atteindre doucement la stratosphère. Ce côté post rock est présent tout le long de l'album et plus précisément sur The Warren où la magnifique voix claire s'accouple harmonieusement à des notes de synthé et à un fond acoustique d'une rare beauté qui insufflent un côté plus mélancolique à la galette. Et à chaque fois que ce côté lumineux tente de cribler le déluge de noirceur qui règne dans la musique de Fen, l'autre voix de The Watcher, crue et meurtrie, relance sa frénésie macabre en inhibant les quelques lueurs célestes qui essaient de s'imposer. Chanteur polyvalent, The Watcher est donc en grande partie responsable de la réussite de l'album car l'alternance chant clair (on peut même parler de chœur en clair parfois) et chant black est un un des points forts de The Malediction Fields.
L'acoustique est aussi très présent sur l'album, aussi bien en rythmique qu'en arpèges. Ainsi Fen n'en finit pas de nous surprendre dans le bon sens avec un solo acoustique très élégant sur As Buried Spirits Stir. Le groupe expérimente même sa propre recette sur Bereft, clôture de l'album qui frôle les 12 minutes qui passent étonnamment très vite. Le tout est très léger et aéré, presque expérimental, la basse s'accapare un break à elle seule, vite rejointe par un violon et un piano qui ajoutent une touche encore plus éthérée et émotive à la composition. La basse à d'ailleurs une place de marque sur l'album, ce qui est assez rare pour être souligné. Le rythme lui est sans cesse varié, Theutus (batterie) opère à merveille ces changements de rythmes, entre brutaux, rapides et lourds, calmes ou même aériens comme sur A Witness to the Passing of Aeons. Seul Lashed By Storm passe un peu à la trappe, car un peu plus faiblard que les autres titres et s'aventurant dans une veine plus raw et angoissante : des sentiers plutôt dangereux pour un groupe atmosphérique.
Certes Fen rappelle les anciens d'Agalloch, d'Alcest ou encore les plus récents de Janvs. Toutefois, il apparaît que Fen n'a rien à envier à ces derniers car il livre un album tout à fait cohérent, varié et ponctué de passages inopinés (sans être pour autant systématiquement original) bâti sur des disparités : entre brutalité sonore et ambiances éthérées et planantes. Là où pas mal de groupes ratent le pari de faire des titres longs qui tiennent la route et restent qualitativement homogènes, Fen relève ce défi haut la main (seulement sept titres pour une durée d'une heure!) en incorporant toujours des breaks différent, des petites subtilités propres au titre pour aérer et varier non seulement le morceau mais aussi à plus grande échelle, l'ensemble de l'album ce qui fait de cet album une réussite totale. Réussite qui pourrait d'ailleurs peut être rallier pour la première fois fan de post rock et de black metal, The Malediction Fields symbolisant l'union forte de ces deux styles intemporels que tout oppose...
Abyssos
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